"D'où me vient ce
bonheur?"
Luc 1,39-56
² "D'où
me vient ce bonheur que
Cette question joyeuse d'Elisabeth, vous
pouvez la faire vôtre, ma Sœur, au moment où vous allez
fêter avec le Sauveur, un demi-siècle de sa
fidélité. D'où vous vient ce bonheur ? D'une longue,
très longue familiarité avec
C'est
C'est elle qui vous a confirmé
que Dieu vous avait regardée, choisie, appelée, et qui vous a
appris toute la valeur de ce regard d'amour.
C'est elle qui vous a lentement
montré que la charité ne connaissait pas de limites, et qu'elle
se vivait à la petite journée dans les mille rencontres de la vie
fraternelle où la bonté est reine et ouvre tous les cœurs.
C'est à son exemple que vous vous
êtes contentée d'une vie simple et joyeuse, remplie de service et
d'humilité, et que vous avez vécu dans la communauté,
heureuse de vous effacer et de chercher le bonheur des autres.
C'est encore l'esprit de service,
puisé à Nazareth et à Cana, qui vous a permis d'accepter
une charge pour laquelle vous vous croyiez sincèrement démunie,
laissant le Seigneur déposer dans votre main gauche ce qu'il vous
demandait de donner de la droite.
² Mais
on ne cesse pas d'être fille de Marie quand l'âge vient, avec son
cortège inévitable de misères et d'impuissances; et Marie
n'a pour nous que l'âge que nous lui donnons dans notre cœur.
Quand le moment vient pour nous d'offrir
au Seigneur non pas les œuvres de nos mains ou de notre esprit, mais de ne
plus pouvoir rendre service et d'accepter nos nouvelles dépendances,
Marie est là, au pied de
Bienheureuse celle dont le cœur ne
change pas, quand changent ses forces et ses moyens de servir. Dieu simplement
devient l'unique propriétaire de ses projets et de ses ressources.
Bienheureuse celle qui trouve dans ses
nouvelles faiblesses l'occasion d'être dans la joie et de rendre
grâces, parce qu'elle a été trouvée digne non
seulement de croire en Jésus, mais de souffrir quelque chose pour son
nom.
Bienheureuse celle qui découvre
dans sa nouvelle pauvreté une richesse cachée et un trésor
à partager avec le sourire.
"La figure de ce monde passe",
et avec elle tout ce que nous ambitionnons pour la gloire du Père; mais
demeure le projet de vie qu'il forme pour chacun de ses enfants, et nous
sommes, avec nos pauvretés et nos richesses, au service de cette vie
qui, éternellement, jaillit de son cœur."Le temps cargue ses
voiles", nous dit saint Paul (1 Co 7,29), mais le temps qu'il nous reste
à courir jusqu'à la grande rencontre, nous pouvons le gorger
d'amour et de bonté, puisque notre vie, dès maintenant
pèse son poids d'amour et que Jésus regarde avant tout l'amour de
notre cœur. Partout aujourd'hui dans le monde,
² Croyez-vous
que Marie, " se hâtant vers le Haut-pays", prenait appui sur sa
joie et son bonheur? Non, elle possédait une certitude plus grande
encore : elle avait trouvé grâce auprès de son Dieu et
était entrée pour toujours dans son plan de salut. C'était
cela qu'elle venait dire et chanter à Elisabeth :
"II a regardé l'humilité de sa
servante.
Le Tout-Puissant a fait pour moi de grandes
choses!"
Plus grand encore que le destin individuel,
il y a le salut du monde, le salut de tous ceux que Dieu veut aimer, et Dieu
connaît le secret de nous insérer dans ce grand œuvre qui a
mobilisé pour Lui le temps et l'espace. Marie y est entrée
jusqu'au bout, et elle y a apporté tout son amour. Vous aussi, ma
sœur, vivez pour l'Eglise de Jésus le temps qu'il vous donne
à vivre parmi vos sœurs, et mettez votre bonheur à
être parmi elles comme la présence de son sourire.