La brebis et la drachme perdues
Lc 15,1-10
Souvent, dans l'Évangile, Jésus nous le rappelle: si nous voulons vraiment être ses disciples, nous devons en prendre les moyens et y mettre le prix.
Aujourd'hui il nous montre quel prix Dieu est prêt à payer pour nous garder dans son amitié, et comment, lui, Jésus, conçoit son rôle de sauveur.
² Le premier exemple qu'il prend a trait directement à la vie communautaire.
Voilà une brebis qui ne se trouve pas bien avec les autres, et qui n'est pas satisfaite de ce que broutent ses compagnes. Insensiblement, elle cherche son bonheur en s'éloignant du troupeau. Elle suit son idée; elle rejoint son désir, sans s'occuper de ce que vivent ou de ce que cherchent les autres.
Quoi dire? - "Tant pis pour elle. Après tout, il en reste bien assez!"
Ce serait voir les choses à la manière humaine. Le Christ Pasteur, lui, raisonne autrement: "Si elle est seule, elle souffre; si elle est loin, elle va se désespérer. Je vais la chercher!"
Sa brebis, vous l'avez reconnue: elle a votre visage, votre allure, votre histoire. Plus elle est perdue, plus elle lui manque; plus elle est isolée, plus il la cherche comme l'unique.
Et ceux qui n'ont rien compris au cœur de Dieu commencent à se scandaliser: "À quoi bon prendre tant de peine pour cette folle, pour cette ingrate qui n'en fait qu'à sa tête!"
C'est ainsi que les pharisiens et les lettrés récriminaient déjà contre Jésus: "Cet individu fait bon accueil aux pécheurs, et il mange avec eux!"
Eh bien, oui! Nous sommes ses invités, nous les indignes, nous les ingrats. Chacun de nous est ramené sur les épaules du Seigneur, qui portent le poids de la rédemption du monde; et c'est toute l'Église, toute la communauté croyante, qui est conviée à la joie de Jésus: "J'ai retrouvé ma brebis, celle qui était perdue", celle qui n'osait plus espérer ni en moi, ni dans les autres, encore moins en elle-même.
² Le Christ se compare ensuite à une femme qui cherche une drachme d'argent, une sur les dix qu'elle avait, et qui ne peut pas se résigner à la perte de cette pièce. Elle allume une lampe, en plein jour, car il fait sombre dans les maisons de Galilée, et elle balaye partout, pour ne laisser passer aucune chance, pour avoir tout tenté, au moins, avant de faire son deuil de la pièce égarée.
Cette brebis ramenée, cette pièce retrouvée, c'est l'histoire de toute conversion: Dieu fait l'impossible, par son Fils Jésus, pour nous réunir au bercail. En réponse, il ne nous demande pas grand chose: un peu d'amour reconnaissant, et un geste d'humilité.
Car il faut que la brebis se laisse rejoindre, et qu'elle se laisse ramener. Or elle reste libre de fuir plus loin encore, vers son malheur, vers son désespoir. Il faut qu'elle croie suffisamment à l'amour du Pasteur pour revenir vers lui, toute blessée, toute amaigrie, toute sale.
Mais comment refuser notre confiance à ce Seigneur qui est "incapable de mépris" (Ps 51,19), qui va rechercher sa brebis en pleine montagne, et ramasse avec douceur son bel argent jusque dans les balayures?
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