Le plus fort

                                                                                                                                        Lc 11,14-26

 

    

Vous aurez remarqué sans doute l'expression que Jésus emploie pour se désigner au cours de cette polémique: il se présente comme celui qui est "le plus fort".

 

Le faux Prince de ce monde se croit en sécurité. Il a l'impression qu'il contrôle tout et que le monde est son domaine, son royaume. Et voilà que survient Jésus de Nazareth, Fils de Dieu, qui se montre le plus fort, parce que, en lui, c'est le Règne de Dieu qui fait irruption dans le monde.

Une lutte est donc engagée, et déjà Jean le Baptiste s'était senti impliqué dans un rapport de forces. Il attendait quelqu'un de plus fort que lui pour soulever le poids du péché de l'humanité:

                         "Moi, je vous baptise dans l'eau,

                          mais il vient, celui qui est plus fort que moi,

                          et je ne suis pas digne de délier la lanière de ses sandales.

                          Lui vous baptisera dans l'Esprit Saint" (Jn 3,16).

Et dans ce "plus fort", le Baptiste reconnaissait le Messie promis par Dieu:

                         "Sur lui reposera l'Esprit du Seigneur, Esprit de prudence et de force" (Is 11,2).

 

Les adversaires de Jésus, au contraire, non seulement récusent son action, mais tentent de la dénaturer par la calomnie: on accuse Jésus de connivence avec les forces du mal; on traite de Béelzébul l'Envoyé de Dieu; on se ferme volontairement au Règne qui vient, à la seigneurie d'amour qui veut investir le cœur de chaque homme.

 

Dans ce refus, dans cette ironie méchante qui fausse le plan de Dieu, Jésus voyait le péché contre l'Esprit. Mais ce jour-là il met à profit l'agressivité de ses ennemis pour nous laisser à tous un double message de réalisme et d'optimisme.

 

Réalisme, car nous ne sommes jamais totalement libérés, mais toujours en effort de libération, toujours en marche vers la liberté que Jésus  seul apporte: "Si le Fils vous libère, vous serez vraiment libres"(Jn 8,36). Jésus est venu "balayer et orner" la maison de notre cœur, pour qu'elle soit fraîche et accueillante, et nous nous sommes réjouis d'y sentir parfois "la bonne odeur du Christ" (2 Co 2,15). À nous maintenant d'entre-tenir cette demeure de Dieu  et de n'y laisser entrer que Celui qui apporte la paix.

 

Optimisme, car Celui que nous accueillons est pour toujours "le plus fort". Tant qu'il nous garde, nous sommes en sécurité, et jamais les forces du mal ne prévaudront en nous contre lui.

Dans notre vie, la crainte sera donc toujours de trop, mauvaise compagne et mauvaise conseillère. Nous n'avons plus à craindre l'image que nous nous faisons de Dieu, ni l'image de nous-mêmes que nous renvoient les autres. Rien à craindre non plus de nous-mêmes, des retours du passé ou des inerties d'aujourd'hui, si nous laissons agir "le plus fort", si nous repartons chaque jour avec la certitude que nous sommes aimés de lui.

 

 

[ Page d'accueil ] - [ Textes de Luc ]