Le choix des Apôtres
Lc 6,12-19
Tous les grands moments de la vie de Jésus sont ponctués par des veillées de prière; et à la veille de choisir ses adjoints directs, nous le voyons passer toute la nuit sur la montagne, non seulement à réfléchir, mais à prier son Père. Il savait que, le lendemain, il allait jeter les bases de sa communauté messianique, donner une ossature à sa future Église et commencer le nouveau rassemblement du peuple de Dieu.
² Au petit jour il rejoint le groupe de ses disciples et il en choisit douze, douze seulement, pour être ses apôtres, ses fondés de pouvoir, ses émissaires officiels.
Douze apôtres, autant que de tribus en Israël: l'intention symbolique est évidente; mais, remarquons-le bien, ce matin-là beaucoup d'autres étaient présents, qui pourtant ne furent pas choisis ... Ils étaient peut-être amis de Jésus tout autant que Pierre et les autres. Rappelons-nous Lazare, que Jésus aimait, et Marthe, et Marie, puis les autres femmes qui l'ont accompagné par la suite avec les Douze: Marie de Magdala, Jeanne, Suzanne, et plusieurs encore. Beaucoup de Galiléens, ce matin-là, ont dû se demander: "Pourquoi pas moi?" C'était la première fois que Jésus faisait entre eux une différence!
Ce jour-là ils ont compris que Jésus était libre et qu'il aurait toujours l'initiative dans les choix et dans les décisions. L'appel à l'amitié s'adressait à tous, mais les charismes seraient différents ... "tous ne seraient pas apôtres" (1 Co 12,29). Ce n'est pas une question de dignité, ni d'aptitude, ni de sainteté, mais une question d'appel à un service.
² Sur quels critères Jésus s'est-il basé? Nous ne le saurons jamais. Un point semble clair cependant, c'est que Jésus a voulu une équipe très diverse, et sans doute très polyvalente.
Parmi les Douze, on trouve aussi bien Simon, le patron d'une petite pêcherie galiléenne, que Matthieu le comptable, aussi bien Jacques le légaliste juif que Philippe qui parlait grec, aussi bien Simon le Zélote, le "résistant", que "le disciple que Jésus aimait", "qui était connu du grand prêtre".
On trouvait aussi Judas, l'homme irremplaçable parce qu'il savait organiser l'intendance du groupe itinérant, ce Judas que Jésus avait choisi parce qu'il l'appréciait. Pour rendre justice au disciple et rendre raison du choix de Jésus, il faut nous garder d'imaginer une sorte de fatalité qui aurait pesé sur Judas. Ne l'oublions pas: d'un bout à l'autre de sa vie avec Jésus, Judas a été libre, aussi libre que nous tous. "Il devint un traître", nous dit saint Luc; c'est donc bien qu'il ne l'était pas lors de son appel!
Il ne faut pas, même pour Judas, projeter le tragique du dénouement sur cette première journée, qui fut pour lui toute d'allégresse et de confiance. Il ne faut pas non plus rejeter sur Judas des trahisons qui ne sont pas la sienne, car nous aussi nous trahissons la confiance du Maître; nous aussi sommes capables d'oublier l'allégresse du premier jour.
² "Jésus descendit avec eux et s'arrêta dans la plaine".
Il y avait là un grand nombre de ses disciples et une grande foule de peuple, des Judéens, des gens arrivés de la grande ville de Jérusalem, mais aussi des païens venus de la côte; bref: une foule hétéroclite préfigurant l'Église de tous les temps.
Jésus s'avança vers la foule, entouré des Douze qu'il avait choisis. Tout le monde les vit; beaucoup les reconnurent. À partir de ce jour-là, les Douze comprirent qu'ils étaient compromis une fois pour toutes avec Jésus et qu'ils ne pourraient plus reculer.
Mais ils n'en avaient pas envie, tant était grande leur joie de pouvoir tout partager du destin de leur Maître.
[ Page d'accueil ] - [ Table de Luc ]