"Votre tristesse se changera en joie"

Jn 16,20-23

 

 

 

 

 

"Lorsque la femme enfante, elle est triste, parce que son heure est venue."

Voilà bien une parole inépuisable du Seigneur, une parole venue du tréfonds de l'expérience humaine, et qui renvoie le cœur humain inlassablement à lui-même et à Dieu.

 

² L'image de la femme qui enfante dans la souffrance était déjà connue de l'Ancien Testament. Dans le livre d'Isaïe, en particulier, elle décrit la cité sainte, saisie par les douleurs et donnant le jour à un peuple nouveau, au temps du Messie.

Ici, la femme qui enfante, c'est la communauté des disciples directs de Jésus: leur souffrance, lors de la mort du Christ, ne sera qu'une épreuve provisoire, transitoire. Bientôt ils se réjouiront que Jésus, nouvel Adam, soit passé au monde définitif.

La femme dans les douleurs, c'est également l'Église, en butte tout au long du temps à la persécution du "monde", au sens johannique, c'est-à-dire le monde du refus: "Dans le monde, disait Jésus, vous aurez de la souffrance; mais courage, j'ai vaincu le monde" (Jn 16,33). Ces souffrances de l'Église sont toujours fécondes, puisque, en rendant ainsi témoignage à son Seigneur, elle réalise son avènement parmi les hommes. Et de même que la Passion de Jésus se poursuit dans la passion de l'Église, la joie des premiers disciples lors de la résurrection se continue dans la joie permanente des chrétiens que Jésus vient "revoir" jour après jour.

 

² Jésus, qui, à Gethsémani, a été "triste à en mourir", ne nous promet pas de nous éviter toute tristesse, mais, à ses yeux, il ne peut y avoir de tristesse définitive: "elle se changera en joie", c'est promis! Il n'y a pas non plus de tristesse stérile, puisque toute souffrance assumée pour le Christ enfante en nous l'homme nouveau. Et surtout, toute tristesse doit s'effacer devant le regard du Ressuscité: "Je vous reverrai, et votre cœur se réjouira." Jésus ne dit pas ici: "vous me verrez", mais "je vous reverrai", car son regard précède le nôtre, tout comme son amour nous devance.

 

² Quand l'heure vient pour une communauté d'enfanter dans la douleur et l'incertitude une nouvelle manière d'être d'Église et d'être au monde, son premier réflexe est souvent d'abattement et de crainte. La vie qu'elle porte en elle va prendre un visage qu'elle ne pouvait pas deviner. Quelque chose d'elle-même va la quitter qui va devenir autonome, et qu'elle ne pourra ni renier ni contraindre. Et surtout la souffrance est là, dont on ne sait ni quand elle vient ni jusqu'où elle ira.

Mais une communauté qui vit vraiment du Seigneur peut faire confiance aux lois de la vie et de la nouvelle naissance. La souffrance, Dieu lui-même la fera oublier, dans la joie de découvrir ce qui sera venu au monde.

 

² Quand l'heure vient pour chacun et chacune de passer un peu plus, un peu mieux, un peu plus vite de ce monde au Père, la tentation se glisse parfois en nous de contourner la souffrance ou l'ascèse, de fuir la lumière qui s'approche, ou de reculer indéfiniment les échéances de la vérité.

Des choix s'imposent: on les évite.

Des clarifications seraient nécessaires: on se réfugie dans l'à peu près.

Des arrachements seraient libérateurs: on préfère garder de vieilles servitudes.

Et on retarde d'autant la joie de l'enfantement: comme l'enfant insensé dont parle Osée le prophète, on s'empêche soi-même de naître. Et c'est cela qui perpétue la tristesse.

 

 

Viens, Seigneur; viens me revoir, en traversant mes peurs et mes tristesses.

Apporte-moi ta joie que personne ne pourra me ravir.

Donne-moi, par ton Esprit Paraclet, de te connaître et de comprendre ta route.

Alors je ne t'interrogerai plus sur rien, parce que d'avance tu m'as répondu.

 

 

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