"La gloire que tu m'as donnée"

Jn 17 20-26

Ep 1,3-14

 

 

Ma Sœur,

 

 

Voici venu le jour que le Seigneur a fait, jour de joie pascale, jour de grâce et d'action de grâces, où vous entrez, pauvre et heureuse, dans la prière de Jésus, pour bénir Celui qui vous a bénie, le Père de qui viennent tout amour et tout don.

 

Pour entrer, nous aussi, dans la louange de sa gloire, et pour nous mettre plus sûrement au diapason de votre bonheur, revenons quelques instants sur ces deux textes si denses que nous venons d'entendre, et méditons

- avec St Paul sur le cheminement de la grâce en toute vie consacrée,

         - avec St Jean sur la mission que Jésus vous offre au cœur de son Église.

 

Trois mots résument, pour St Paul, l'œuvre du Père pour le salut des hommes :

         il nous a choisis dans le Christ,

         il nous a fait grâce en son Bien‑aimé,

         il a fait surabonder sa grâce en nous faisant connaître sa volonté

 

² Vous reconnaissez là aisément, ma Sœur, la trace du don de Dieu dans votre propre vie. Dans son éternité de joie, le Père a eu pour vous une pensée d'amour, un regard d'amour. I1 vous a d'avance destinée à être sa fille, à vivre comme sa fille, identifiée au Fils unique et fascinée par Lui. I1 vous a choisie pour être , face à lui, "sainte et irréprochable" ; et à ce dessein bienveillant de Dieu il vous faut sans cesse revenir, c'est ce rêve de Dieu qu'il vous faut habiter, pour croire de nouveau à son amour quand vous vous désolez de n'être pas sainte et que "votre cœur vous fait des reproches".

 

² Aussi bien, comment pourriez‑vous douter ou perdre cœur, puisque Celui qui vous a choisie vous a fait grâce et ne cesse de vous faire grâce, puisqu'il vous a donné d'avance l'amour qu'il vous réclame, puisqu'il vous régénère chaque jour par le Sang de Jésus et refait de la vie à partir de toutes vos morts?

 

² De plus, sur vous aussi le Père a fait surabonder sa grâce : tout en vous fortifiant pour la route, I1 a mis sa lumière dans votre cœur. Au moment favorable, et par pure bonté, I1 vous a fait entrer dans son dessein de bonheur, I1 vous a fait connaître le mystère de sa volonté : non seulement le rôle unique dévolu au Christ pour mener à bien l'accomplissement des temps, mais votre place personnelle, au cœur de l'Église, dans l'œuvre de réconciliation universelle.

Après vous avoir mise directement au service des malades et des démunis, Jésus vous a appelée à l'œuvre  sacrée et cachée de la prière et de l'intercession; et aujourd'hui, entourée de toutes celles qui ont su accueillir et encourager votre recherche spirituelle, répondant librement au désir infiniment libre de Jésus Sauveur, vous vous engagez pour toujours à vivre, au Carmel, pour la louange de sa gloire.

 

Ainsi commence à s'éclairer pour vous le cheminement de la grâce, et dans la lumière de Pâques, vous discernez déjà un peu mieux à quel héritage Dieu vous a d'avance destinée, et de quel sceau vous avez été marquée par l'Esprit de la promesse.

 

² En disant oui au Christ sur la route toujours montante du Carmel, non seulement vous ratifiez dans la joie le choix de Dieu, mais vous ouvrez votre cœur et votre vie à une mission spécifique pour la gloire de Dieu et le salut du monde.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Carmel est responsable, dans l'Église, d'un style de présence et d'un style de témoignage qui portent tous deux les marques du silence, de l'intériorité, et une empreinte toute mariale de soumission à la Parole de Dieu.

Les années déjà passées dans la vie contemplative vous ont appris quel courage, quelle constance réclame l'aventure spirituelle, et à quelles ressources de bonté fait appel le coude à coude quotidien. Vous avez mesuré la force du contrat fraternel, le pouvoir du pardon, et l'urgence des conversions pour la fidélité communautaire Tout cela est présent à votre esprit aujourd'hui, et confère pour une part à votre engagement sa densité évangélique.

Sans nous attarder sur ces convictions qui déjà tonifient votre vie, écoutons plutôt une consigne que Jésus nous laisse à la fin de son entretien après la Cène, et qui peut illuminer de l'intérieur le reste de votre Montée du Carmel.

 

"Que tous soient un, dit Jésus, comme Toi, Père, tu es en moi et que je suis en toi".

 

² L'unité des croyants, ma Sœur, doit être votre souci ; elle est votre mission, elle peut devenir un axe privilégié de votre chemin spirituel.

Si vous mettez toutes vos forces au service de l'unité, proche et lointaine, communautaire et universelle, vous partez gagnante, car vous êtes portée d'avance par la victoire pascale de Jésus. Jésus a prié pour l'unité, le dernier soir avant la Passion; il prie, dans la gloire, pour l'unité de ses disciples, et dans cette prière glorieuse, victorieuse, il vous invite à entrer avec la confiance des pauvres de cœur.

 

Et non seulement Jésus fait de l'unité l'objet de sa prière, mais il la prépare activement dans chaque cœur de croyant. Sur ce point la pensée de Jésus est surprenante et nous ouvre des perspectives splendides:

"Moi, je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée                                                                                                      pour qu'ils soient un comme nous sommes un".

Pour que nous soyons un, pour que nous puissions marcher vers l'unité et atteindre notre achèvement dans cette marche vers l'unité, Jésus déjà nous a donné la gloire qu'il a reçue du Père, il nous a ouvert l'accès à cette union mystérieuse du Père et du Fils, à cette réciprocité indicible et rayonnante qui est, proprement, sa gloire de Fils.

Pour travailler à l'unité, il nous faut donc avant tout entrer dans la gloire de Jésus, entrer, avec Jésus et par Jésus ressuscité, en réciprocité d'amour avec le Père. Là s'enracinent, ma Sœur, toute votre vie de prière et votre présence missionnaire au cœur de l'Église. En effet, laisser oeuvrer en nous la gloire de Jésus, c'est accéder à l'unité fraternelle; accéder à l'unité, c'est permettre au monde de reconnaître en Jésus l'Envoyé de Dieu et de reconnaître dans les disciples unis l'amour du Père à l'œuvre et victorieux.

 

En vous avançant aujourd'hui vers le Dieu de votre appel, ma Sœur, ouvrez‑vous par la foi à cette gloire déjà donnée par le Sauveur, avant de la contempler face à face quand vous serez là où il est, quand il vous aura prise pour toujours avec lui.

Demandez à la Mère de Jésus son secret de Servante.

Qu'Elle vous aide à accueillir, à garder dans la terre profonde de votre cœur, au nom de tous les hommes, ces merveilles pour lesquelles Dieu vous a créée

 

                                                                     à la louange de sa gloire.

 

 

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