"Voulez-vous partir, vous aussi?"

Jn 6,60-69

 

 

 

 

 

 

² Suivre le Christ, c'est aller au-devant de choix difficiles.

Même les contemporains de Jésus en ont fait l'expérience. Chaque jour ils entendaient sa voix, chaque jour ils étaient témoins de miracles; et pourtant la foi leur demandait un effort. Ils butaient, non pas sur les actes du Christ, mais sur ses paroles. Les guérisons étaient trop évidentes, et personne ne songeait à les nier; mais son message suscitait des réactions parfois violentes. On était prêt à reconnaître en Jésus de Nazareth un rabbi extraordinaire: "Jamais homme n'a parlé comme cet homme! "; et beaucoup le considéraient même comme un prophète authentique. Mais certaines de ses déclarations apparaissaient, aux yeux des croyants d'Israël, comme des prétentions intolérables: "Comment peut-il dire: tes péchés sont remis? Comment ose-t-il affirmer: le Père et moi, nous sommes un?"

Le miracle des pains multipliés sur la colline, et surtout le commentaire que Jésus en a donné le lendemain dans la synagogue de Capharnaüm, ont marqué à coup sûr un tournant important dans le cheminement de la foi des partisans de Jésus.

 

² Dans son discours de Capharnaüm, où l'on retrouve aisément les lois de composition des homélies juives traditionnelles, Jésus se présente comme le Pain de la vie, et à deux niveaux:

Le Pain de la vie, c'est d'abord son enseignement, la révélation qu'il apporte, et qui doit nourrir la foi des disciples.

Mais Jésus revendique ensuite un pouvoir encore plus inouï: "Le Pain de la vie, c'est ma chair, pour le salut du monde. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle." Cette fois, c'en est trop: "Ce qu'il dit là est intolérable! On ne peut pas continuer à l'écouter!"

Et à partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s'éloignèrent et cessèrent d'aller avec lui. Jésus n'a pas rabaissé ses exigences pour les retenir plus facilement. Simplement, par une question, il a rappelé aux Douze la gravité de leur choix: "Voulez-vous partir, vous aussi?"

 

² "Veux-tu partir, toi aussi?"

Cette question du Christ nous atteint, nous aussi, là où nous sommes, là où nous en sommes. Il y a tellement de manières de partir, de s'éloigner, de cesser d'aller avec le Christ!

Sans trahir tout à fait, on peut s'arranger pour rester à mi-pente, en serrant les mains très fort sur les joies ou sur les sécurités immédiates, celles du métier, celles des loisirs, celles de l'influence ou du pouvoir exercés.

Ou bien, tout en gardant un certain attachement pour la personne du Christ, on peut renoncer à bâtir avec lui, et laisser à d'autres tous les risques du témoignage, dans la société ou dans la famille.

Ou bien encore, ayant rencontré Dieu et son Christ en profondeur à un moment plus intense de vie et de lucidité, on se laisse retomber dans l'à-peu-près, on prend ses distances par rapport au Règne de Dieu, soucieux simplement de tirer son épingle du jeu de l'existence.

Certains préfèrent opérer un tri, retenant, du Christ et de son message, ce qui va dans le sens de telle ou telle idéo­logie, de telle ou telle promotion.

Enfin, devant l'immensité de la moisson et le petit nombre des ouvriers, devant les épreuves de l'Église et les soubresauts qui l'agitent, certains sont tentés de perdre cœur et de baisser les bras, au risque de remettre en cause leur engagement premier.

 

²     "Veux-tu partir, toi aussi?"

À cette question du Seigneur, nul d'entre nous ne peut ni ne veut échapper, au moment de recevoir son Corps sous le signe du pain. Le Seigneur nous la pose, non pas pour que nous cédions à la peur ou à l'angoisse, mais parce qu'il  connaît notre capacité de  nous faire illusion et qu'il prend au sérieux notre liberté et notre amour.

Ce qu'il veut susciter en nous, c'est la réponse réaliste et confiante de Simon Pierre:

"Seigneur, vers qui pourrions-nous aller", hormis toi?

 Quelle amitié, sinon la tienne, pourrait donner sens à la vie?

 Quel maître pourrions-nous servir qui nous fasse traverser la mort?

"C'est toi qui détiens les paroles et les réalités de la vie éternelle".

 

 

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