Joseph le Juste

 

 

De saint Joseph, l'Évangile n'a pas gardé la moindre parole, mais malgré ce silence nous savons de lui une chose magnifique : il est l'homme qui a su écouter.

 

² Le premier souci de Joseph, tout au long de sa vie, c'est de se laisser mesurer par la Parole de Dieu .

Il accepte que Dieu lui parle par les événements, heureux ou malheureux, et que la volonté concrète de Dieu vienne parfois en travers de ses plans pour dessiner la croix dans sa vie.

Il accepte que Dieu intervienne au milieu des gestes quotidiens, sans l'avertir d'avance.

Il accepte de ne pas détenir la clé de sa propre existence; il consent que sa vie soit rythmée par les initiatives imprévisibles de Dieu, et que le Seigneur lui donne l'avenir par petites bouchées ; et il est libre, parce qu'il a un cœur de pauvre.

 

² Il sait pourtant, par expérience, que la Parole de Dieu de plus en plus l'entraîne dans le mystère.

Il s'étonne de ce qui lui arrive, mais cache aussitôt dans son silence tout événement dont la portée lui échappe.

Le mystère entre dans sa vie, tout comme dans la nôtre, mais il l'accueille, sans chercher à le nier, à le réduire, à l'éliminer, attendant seulement que Dieu donne sens à ce mystère par une nouvelle parole.

Sans rien laisser perdre du mystère que Dieu lui fait vivre, il dit oui d'avance à la parole libératrice, qui ne manquera pas de venir..

 

² Et voilà que cette parole, lorsqu'elle vient, redouble l'exigence de la foi : "Ne crains pas", dit le Seigneur ; or il y avait humainement tant à craindre ! "Lève-toi ; prends l'enfant et sa mère, et fuis en Egypte!"

 

  "Fuis, Joseph!

- "Mais jusqu'à quand, Seigneur?"

- "Jusqu'à ce que je t'avertisse" ... Jusqu'à ce qu'une parole intervienne !

- "Mais alors, ce ne sera pas définitif? Je ne pourrai pas prévoir l'avenir, ni pour Marie, ni pour le bébé ?"

- "Reste là-bas, jusqu'à ce que je te le dise".

- "Alors je ne pourrai pas m'installer là-bas ?"

- "Ta vraie place, Joseph, c'est là où vit Jésus, là où tu accompagnes Marie ..."

 

Et Joseph se lève, car la parole de Dieu, malgré la nuit de la foi, est plus forte que toutes les évidences contraires.

Il prend, de nuit, l'enfant et sa mère, l'enfant qui dort et sa mère qui frissonne, et il part.

 

Quant à nous, nous voulons bien prendre Jésus et Marie, mais pas pour entrer dans la nuit, pas pour marcher vers l'exil, pas pour continuer notre exode, de Nazareth à Bethléhem, de Bethléhem en Égypte, et de l'Égypte vers Dieu sait où, car nous avons notre idée sur la vie qui nous convient.

 

² Joseph, lui, s'interdit de mener deux vies à la fois, celle qui correspond à ses projets et celle qui se plie au projet de Dieu. Et il a le cœur léger, il a le cœur libre, parce qu'il vit la béatitude du serviteur qui veille pour le service de son maître.

Il s'identifie pleinement à sa mission, sans chercher la sainteté ailleurs que dans la volonté présente de Dieu.

Et sa mission, quelle est-elle ? assurer la mission de Jésus et celle de Marie. Il n'est pas venu pour être servi, ni par Marie ni par Jésus, mais pour servir, aimer, se livrer chaque jour, tel qu'il est, tel que Dieu le veut.

 

²    Même sa vie affective est toute vouée à Dieu.

Il fait à Dieu l'honneur d'être heureux de son sort : sa vie se déroule dans un cadre très humble, toujours limité, mais il a découvert la grandeur du service caché, et il lui suffit de vivre dans l'intimité de Jésus et de sa Mère. Sa grande joie, c'est de mériter leur confiance et d'user ses bras pour les rendre heureux.

Toute sa force lui vient de la loyauté de sa foi, toute sa richesse est dans son regard intérieur, toute sa liberté s'enracine dans un don joyeux, jamais regretté, jamais repris, et c'est cela surtout qui plaît à Dieu:

 

"Dieu aime ceux qui donnent avec joie".

 

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