Élire des conseillères

 

Quelques notes

 

 

    

Quelques évidences pour introduire la réflexion

 

. L'élection des conseillères n'est pas une simple formalité. Comme toutes les démarches qui ont une incidence sur la vie communautaire, elle gagne à être préparée par la prière et par un effort de discernement.

 

. Une élection réfléchie et dépassionnée permet une composition plus harmonieuse et un meilleur fonctionne-ment du conseil ; or un conseil où les sœurs travaillent dans un bon esprit peut apporter beaucoup à la commu-nauté, sous l'angle :

-          de la communion, du climat fraternel de la communauté;

-          de la communication (qu'il s'agisse de diffuser les renseignements et les consignes, de faire connaître l'état des esprits, le bien-être ou le mal-être de la communauté) ;

-          du sentiment d'appartenance, si important pour la solidarité réelle de chacune avec la communauté ;

-          de la participation de toutes au bien commun ;

-          de l'attention aux vrais besoins et aux souffrances cachées ;

-          de la prise en compte du réel de la communauté, de ses espérances, de ses désirs, de ses forces et de ses possibilités ;

-          de la dynamique communautaire, notamment en ce qui touche les prévisions et les rappels, la continuité de l'action et des efforts entrepris, ou encore le rythme souhaitable des progrès et des changements.
 

 . Dans la vie communautaire, tout ne relève pas du conseil, et une grande part du vécu personnel des sœurs reste en dehors de ses compétences. Mais beaucoup de points demandent à  être abordés en conseil, si l'on veut que les décisions soient au maximum justes et pondérées.

 

 1.   Les tâches d'une conseillère

 

Il est demandé aux conseillères :

-          de percevoir le vécu de la communauté,

-          d'analyser le vécu ou les choses à vivre,

-          de peser les décisions à prendre,

-          de proposer des solutions ou des moyens de progrès,

-          d'accompagner l'effort de la communauté.

 

 

Percevoir le vécu de la communauté

 

À partir des événements marquants, heureux ou malheureux, que traverse la communauté, le conseil, avec la prieure, cherche les meilleures réponses et les meilleures orientations, mais aussi à partir du quotidien, relu dans une perspective évangélique, en vue d'une plus grande fidélité créatrice au charisme de l'Ordre, et cela dans tous les domaines de la vie communautaire: prière et liturgie, vie fraternelle, travail, rayonnement apostolique.

 

Le conseil       - répercute les espérances qui naissent, le senti communautaire après des expériences fortes ou des rencontres décisives,

    - capte les vibrations dans le sol communautaire,

                       - détecte les crispations, les blocages, les débuts de crise.

 

 Analyser le vécu ou les choses à vivre

 

C'est souvent un travail d'objectivité qui incombe au conseil. Il lui faut prendre le recul suffisant et se poser les questions du bon sens :

-       quel est le vrai problème ?

-       où se trouve réellement la difficulté ?

-      la situation est-elle déformée quelque part ? où ? les données du problème sont-elles parasitées par la passion, par la volonté de puissance ? (Ces questions peuvent être abordées paisiblement, en nommant ce qu'il faut nommer, mais sans épiloguer sur les personnes plus qu'il n'est nécessaire ou raisonnable) ;

-      quelle est la véritable urgence ?

-      que faut-il mettre en œuvre, préciser, préparer ?

 

Ce travail d'analyse peut être grandement facilité si la prieure a annoncé à temps l'ordre du jour du conseil et au besoin  amorcé la réflexion par un court questionnaire.

 

Peser les décisions à prendre

 

"Que pensez-vous de …?" ; "que penseriez-vous si …?"

À ces questions posées par la prieure les conseillères sont appelées à répondre sans passion et sans calcul, avec le seul souci du bien commun.

Parfois les sœurs du conseil vont élaborer avec la prieure un questionnaire destiné à la communauté.

Bien des choses relèvent plus du conseil que d'un grand débat communautaire, mais tout ce qui touche le bien-être, le cadre de vie, la vie quotidienne ou les habitudes, l'horaire ou l'usage des lieux et des objets, gagne à être abordé en communauté, même si les décisions ultimes restent du ressort de la sœur prieure.

Dans une communauté où les relations sont fraternelles, on veille avec soin à ne pas court-circuiter le discernement communautaire et à lui assurer toute sa qualité humaine : si une chose est déjà décidée en conseil, on ne lancera pas en communauté un débat de pure forme, mais on dira tout simplement : "Nous avons décidé au conseil que …".

Rien n'oblige, par ailleurs, à prendre toujours les décisions à chaud (ou à très chaud) à l'issue d'une réunion communautaire. Le conseil peut très bien fonctionner, dans certains cas, après le débat communautaire, pour éclairer une décision délicate que seule la prieure peut prendre ou sceller de son autorité.

 

Proposer

 

Une sœur du conseil sera souvent amenée à faire une proposition en réponse à une demande de la prieure, et dans ce cas il est important que les sœurs du conseil aient eu le temps de réfléchir et de prier.

Mais il est également souhaitable que toute conseillère se sente à l'aise pour suggérer spontanément une mesure ou un progrès, lorsqu'elle repère dans la communauté un vrai besoin ou une attente.

Ces propositions spontanées sont parfois délicates à gérer à l'intérieur du conseil. La sœur qui propose doit pouvoir compter, de la part des autres conseillères, sur un accueil positif, sur un a priori favorable, à tout le moins sur une écoute suffisamment patiente ; mais par ailleurs elle ne peut revendiquer aucun statut privilégié et doit se soucier de laisser aux autres leur espace de créativité et leur droit à la différence. Si son projet n'est pas retenu, elle n'en fera pas un drame ni un point d'honneur.

En tout état de cause, le conseil ne saurait être un endroit pour bouder.

 

Accompagner l'effort de la communauté

 

L'un des signes de santé d'une communauté, c'est sa capacité de maintenir dans la durée ses objectifs, les efforts entrepris et les projets en cours.

Les conseillères, de ce point de vue, peuvent jouer un rôle important de "mémoire vive" de la communauté, ou de mémoire suppléante pour la prieure, et elles peuvent aider la communauté à poursuivre sa route dans la continuité, la concertation et la bonne humeur.

Cette marche constante au pas de la communauté suppose que les réunions du conseil soient tenues à une fréquence raisonnable. Dans un même souci d'efficacité, il faut savoir ne pas traîner dans un conseil et s'en tenir, sauf cas de force majeure, à l'horaire prévu, afin que les sœurs conseillères ne voient pas leurs journées totalement déséquilibrées.

Il arrive que les conseils ne soient plus programmés que de loin en loin, et ce n'est pas toujours dû à une tendance autocratique de la prieure. Parfois, en effet, la responsable, qui souhaiterait une vraie collaboration avec son conseil, se trouve comme paralysée par certaines des conseillères qui se montrent constamment fermées, agressives, ou négatives a  priori. Dans d'autres cas, les conseillères, pour des raisons de rivalité, se neutralisent réciproquement, rendant impossible tout travail commun et toute recherche sereine du bien de l'ensemble.

Le service de la communauté requiert que le conseil demeure un instrument souple, vigoureux et dynamique. 

 

          

2.       Les qualités d'une conseillère

 

Les qualités d'une conseillère sont celles que l'on aime retrouver en toute moniale. On regretterait simplement un peu plus de ne pas les découvrir chez une sœur du conseil.

Énumérer ces qualités peut avoir un effet stimulant ; mais cela pourrait paraître un peu désolant et décourageant, si l'on y voyait le portrait de la conseillère idéale, forcément virtuelle, et introuvable par définition.

Admettons tranquillement que même la meilleure des conseillères ne possède pas toutes ces qualités, mais que l'on a plaisir à lui en reconnaître quelques-unes.

 

 1.         L'amour de la communauté

 

C'est une qualité largement répandue, et que la vie communautaire affine au long des années, comme le vin que le temps améliore quand le fût a fait ses preuves.

Encore faut-il que cet amour reste lucide, sainement exigeant, ouvert au progrès, aux conversions, et aux besoins des autres monastères. Des dérives, en effet, sont possibles dans l'amour de la communauté, en particulier l'égoïsme communautaire, dont il faut toujours se méfier raisonnablement, car il est généralement très inconscient et n'est vraiment sensible qu'aux personnes qui abordent de l'extérieur le monastère.

L'habitude de vivre en relative autarcie, face aux mêmes visages, dans des lieux très familiers et sans renouvellement périodique des relations, peut rétrécir à l'insu des sœurs le champ de leurs intérêts et émousser leur attention aux personnes étrangères au groupe communautaire.

 

2.         La disponibilité

 

La communauté attend d'une sœur conseillère la serviabilité et le sens du service gratuit. Là encore, c'est une disposition que l'on rencontre aisément chez une moniale.

La disponibilité, avec la liberté intérieure qu'elle suppose et qu'elle développe, constitue une base très sûre pour une charge de conseillère, parce que la sœur est prédisposée par là à comprendre les urgences du bien commun ; elle n'est pas attachée à une fonction ou à un travail au point de tout voir par cette unique fenêtre.

 

3.         La discrétion

 

C'est la qualité acquise la plus nécessaire chez une conseillère. On est discrète par vertu, c'est-à-dire à force de vigilance et de contrôle ; on devient volontairement discrète : c'est la différence avec le jugement, que la personne ne peut obtenir à coup de volonté s'il n'y a pas déjà en elle une base, fruit de la première éducation.

Assez souvent c'est le manque de discrétion d'une sœur qui dissuade la communauté de l'élire ou de la réélire comme membre du conseil.

 La discrétion implique une maîtrise suffisante de la parole, en groupe et en dialogue particulier. Une conseillère doit savoir garder un secret, dans la durée, et jusqu'au-delà de son mandat. Elle doit admettre que le conseil, et lui seul, soit détenteur, gardien et garant de tel ou tel secret : si le secret est décidé par le conseil, seul le conseil pourra le lever ; ce n'est pas à chacune de s'en affranchir librement, au gré des circonstances ou des rencontres.

Il existe un seul cas où la discrétion de la conseillère sur la situation communautaire peut céder devant une exigence plus grande encore, c'est le cas de la visite canonique du monastère. Dans l'esprit de l'Église, c'est un moment de libération des consciences, c'est un recours ultime pour les sœurs qui auraient l'impression d'étouffer sous un secret anormal, à plus forte raison sous un secret qui couvrirait un scandale.

Des moniales entendent parfois dire, en conseil ou en communauté : "De ce point on ne parlera pas au visiteur". Elles doivent savoir qu'elles ne sont en aucun cas liées par une telle consigne. Celle-ci constitue en elle-même un désordre qui peut être grave aux yeux de l'Église.

 

 4.         Une insertion normale dans la dynamique communautaire, et l'expérience d'au moins un secteur de l'activité du monastère.

 

La conseillère est nécessairement une sœur qui participe activement aux réunions communautaires. On cite parfois le cas, caricatural mais nullement illusoire, de cette conseillère qui était toujours muette lors des échanges communautaires. Pour les sœurs en formation, il peut être important que la conseillère soit parmi les sœurs qui vivent sérieusement l'engagement communautaire, spécialement en ce qui regarde la prière et les vœux.

Elle doit aussi savoir par expérience ce qu'il en coûte d'assurer, dans la durée :

-          une régularité dans le travail ;

-          un rendement suffisant ;

-         une dépendance par rapport aux commandes, aux clients, ou à d'autres sœurs attelées à la même         tâche, surtout quand les ateliers ont programmé une chaîne dans le travail ;

-         une saine transparence par rapport à la prieure ou à l'économe.

  

5.         L'objectivité

 

L'objectivité est une qualité de l'intelligence, mais qui implique toujours une attitude du cœur.

C'est une capacité de discerner, dans ce que je dis, propose ou défends, ce qui traduit la réalité des choses, des événements ou des personnes, et ce qui relève de mes sentiments, de mes dispositions personnelles ou de mon caractère.

Nous nous y exerçons dans toute la vie relationnelle, mais spécialement lors des réunions et des détentes communautaires. C'est une véritable ascèse, qui nous libère des réactions passionnelles, qu'il s'agisse de l'engouement, de l'exubérance, de l'amertume ou de la pugnacité. L'objectivité constitue également un véritable chemin d'amour fraternel, parce qu'elle est un raccourci vers la vérité pour soi, pour les autres, pour le groupe communautaire, en dégageant la vérité de toute gangue d'agressivité, de rancœur ou d'impatience.

L'objectivité se trouve à la base de toute vraie sagesse et de tout discernement : les plus aptes au discernement sont celles qui savent prendre une vraie distance par rapport au retentissement affectif des événements ou des paroles, par rapport aux impressions immédiates et aux habitudes intellectuelles.

 

6.         Le jugement

 

Le bon jugement est sans doute la qualité primordiale que l'on attend d'une conseillère. En effet, si une aveugle (une sœur aveugle sur elle-même) guide une autre aveugle (la communauté qui cherche sa voie), toutes deux tomberont dans le même trou (Mt 15,14).

Le jugement, c'est la capacité de situer avec exactitude, objectivité et opportunité, les faits, les événements, les personnes et les comportements par rapport au contexte de vie et au but poursuivi. C'est en même temps la capacité de se situer avec vérité, justesse et opportunité, par rapport à soi-même, aux autres personnes, aux événements et aux comportements.

C'est pourquoi une personne qui manque de jugement se trouve sans cesse en décalage et en porte-à-faux.

 

Le jugement fait partie des critères de base qui permettent de discerner une vocation, en particulier au sacerdoce ou à la vie religieuse.

Certains manques, légers, de jugement restent compatibles avec la vie communautaire, moyennant une attitude d'humilité et de confiance envers les supérieurs ; mais en général une sœur qui manque de jugement ne saurait être retenue pour faire partie du conseil.

Il faut le redire avec force : le manque de jugement, qui demeure une gêne dans la vie relationnelle, n'est pas une condamnation par Dieu ! C'est un handicap, que la personne est appelée à assumer avec pauvreté de cœur. En général c'est une difficulté qui demeure, mais de grands progrès sont possibles quand la personne accepte de mesurer son jugement à celui des responsables ou à celui de personnes reconnues sages et pondérées.

[ Sur cette question du jugement, voir l'article "Maturité et vie consacrée", dans le Lien des contemplatives, n°111, repris sur le site http://perso.jean-leveque.mageos.com ]

 

7.         Le courage

 

Le courage concerne surtout, ici, la prise de parole.

On peut parfois remettre à plus tard un problème, une question, une réponse claire qui peuvent attendre, lorsqu'on risquerait de tomber à côté ou de desservir une cause par trop de précipitation. Mais une conseillère ne peut dissimuler une chose importante, son propre avis, son jugement sur une situation ou son opinion sur le comportement d'une personne, par peur d'irriter la prieure, d'être seule de son avis ou simplement d'être elle-même, en face de sœurs plus douées ou plus affirmatives, car alors elle cesserait de servir le bien commun.

Pour certaines conseillères, parler réclame un véritable effort, quand elles se sentent moins assurées, moins compétentes ou moins brillantes que d'autres sœurs du même conseil. Elles peuvent alors s'appuyer sur la promesse du Seigneur : " Mettez-vous bien dans l'esprit que vous n'avez pas à préparer d'avance votre défense, car moi je vous donnerai une bouche et une sagesse", c'est-à-dire des mots et le ton pour les dire (Lc 21,15). Le courage de parler jaillira, en toute circonstance, d'une écoute de la parole de Dieu : " Ce que vous aurez à dire vous sera donné à cette heure-là ; car ce n'est pas vous qui parlerez, mais c'est l'Esprit de votre Père qui parlera en vous" (Mt 10,20).

  

8.         L'humilité

 

L'humilité qui est demandée à une conseillère ne consiste pas à s'effacer complètement, à "s'écraser", à disparaître ou à se taire toujours. Un pneu dégonflé n'est d'aucun secours pour la voiture, même et surtout pour la roue de secours.

Simplement, la conseillère aura à cœur de proposer sans imposer, de préparer (parfois par écrit) ses interventions, et elle s'efforcera de ne pas tout considérer à partir de sa propre spécialité. Si elle est brodeuse, elle saura s'intéresser au point de vue d'une autre conseillère, préposée au jardin ou au clapier.

 

9.         La maîtrise de la parole

 

Traditionnellement, dans l'enseignement des maîtres d'Israël, la maîtrise de la parole mesure le degré de sagesse d'un conseiller.

En réunion de conseil, chacune doit savoir mesurer ses interventions pour ne pas accaparer la parole.  

Chacune également doit pouvoir se centrer sur le bien commun, en faisant taire, au besoin, ses impatiences ou ses revendications personnelles. Le conseil, en effet, n'est pas un lieu où l'on règle des comptes avec une autre ou les autres sœurs. Une conseillère soucieuse de garder une parole constructive (Ep 4,29) s'interdira également d'imposer un chantage ou de marchander sa participation dans le langage du "tout ou rien".

De même, hausser le ton n'a jamais donné de la force à un argument. Traiter les problèmes sur le mode passionnel, ce serait quitter l'objectivité et ramener tout au niveau du sentiment ou du ressentiment. Un climat passionnel empêcherait le conseil de faire son travail de discernement et de prospective ; cela amènerait une contrainte de la parole et dissuaderait parfois d'aborder des questions urgentes, de peur de provoquer les éclats de telle ou telle.

Les sœurs du conseil doivent pouvoir avancer ensemble vers la vérité, sans chercher à triompher l'une de l'autre. Dans les échanges humains, "plus la lumière est pure, moins elle est contraignante" (H. de Lubac).

 

 

3.       Comment choisir les conseillères ?

 

² Il s'agit, lors des élections, de constituer une équipe capable de travailler avec la prieure, à partir de sœurs capables de travailler ensemble.

Même si la prieure peut parfois demander l'avis d'une des conseillères en particulier, le conseil ne joue pleinement son rôle que de manière collégiale, donc lorsqu'il est réuni. La prieure a même l'obligation de le convoquer lorsque, pour poser un acte, elle a besoin, selon le droit, de son consentement ou de son avis.

Le conseil n'est pas forcément composé de sœurs qui sont d'avance d'accord sur tout, mais  de sœurs qui peuvent travailler dans l'unité à partir de leur diversité. L'Esprit Saint lui-même crée la diversité, non pas la division; il promeut les différences, mais non pas les oppositions.

 

² Il faut se rappeler, au départ, plusieurs évidences :

 

-          La charge de conseillère est un service de la communauté ;

-          Chacune a le devoir d'élire les sœurs qu'elle juge, devant le Seigneur, les plus aptes à ce service. (Si le groupe auquel j'appartiens a besoin d'un charpentier, je ne vais pas proposer mon ami Charles parce que c'est un bon garçon et mon compagnon de toujours : je vais donner le nom d'un charpentier dont j'ai vu le travail).

-          On n'élit pas conseillère une sœur simplement pour lui faire plaisir, ni non plus par commisération : …"Elle attend depuis si longtemps !"

-          On ne choisit pas non plus une sœur simplement parce qu'elle ne l'a jamais été ; mais à l'inverse on élit parfois une sœur qui ne l'a jamais été, soit parce que le temps a montré ses aptitudes, soit parce qu'on a de bonnes raisons de tester ses aptitudes (c'est le cas, assez souvent, d'une sœur qui sera la plus jeune du conseil).

-          On n'élit pas non plus une sœur "pour la faire taire", ou en disant : "Mieux vaut l'avoir dedans que dehors", car en général, passé un certain temps, la sœur sera au dedans du conseil exactement comme elle est au dehors.

 

 ² La première conseillère, vu le rôle que lui donnent les Constitutions (n° 220, 236), doit être élue avec un soin particulier.

 

Elle peut être appelée à assurer l'intérim, parfois de manière tout à fait imprévue, et pour une période plus ou moins longue. C'est à elle aussi, en premier lieu, qu'il incombe de pallier les oublis ou les insuffisances de la prieure.

Traditionnellement, dans nos communautés, c'est à elle qu'on s'adresse comme recours naturel quand se produisent un petit frottement entre le conseil et prieure, entre la prieure et une sœur, ou une légère incompréhension, éventuellement un faux pas de la prieure, ou quand se présente un problème qui met en cause la prieure, soit à l'intérieur, soit à l'extérieur du monastère.

 

² En général les deux premières conseillères sont relativement faciles à élire, parce que toutes les sœurs ont bien deux noms en tête, et que l'on trouve sans trop de mal deux sœurs capables de travailler avec la prieure élue.

La suite des élections s'avère parfois plus délicate,

-          parce que le choix devient un peu poins évident,

-          parce que les voix plus facilement se dispersent,

-          parce que la tentation peut venir à une sœur de voter selon ses sympathies plus qu'en fonction du bien commun,

-          parce que la fatigue et l'énervement peuvent plus facilement fausser les derniers tours des élections.

 

C'est le moment de se rappeler qu'un conseil efficace est une équipe qui travaille en équipe. Entre deux sœurs, on choisira donc la plus apte à travailler en concertation et à s'insérer souplement dans le groupe.

 

² De plus en plus dans les monastères – et c'est un excellent réflexe – au moment des élections on se soucie également de la formation des nouvelles arrivantes au monastère, et l'on se demande, non seulement  : "Qui va prendre en charge la communauté ?", mais : "Qui va assumer le postulat et le noviciat ?"

 

² Ceci dit, tout comme il n'y a pas de prieure idéale, il n'y a pas de conseil parfait. C'est pourquoi il est bon que chacune des conseillères revoie, pour sa part, en dialogue avec le Seigneur, la manière dont elle a géré sa parole fraternelle lors du dernier conseil. C'est pourquoi aussi il est bon, avant une réunion de conseil, que les sœurs se rassemblent en un moment de prière, pour se mettre à l'écoute de la parole de Dieu et accueillir dans la concorde l'Esprit Saint qui renouvelle toutes choses, et qui fait du neuf avec toutes nos vieilleries, de la vie avec toutes nos petites morts.

   

fr. Jean Lévêque, ocd

 

 

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